Les chroniques de voyage de PJ : Istanbul 3/6

Istanbul 2

Il devait y avoir une super soirée pas loin dans le quartier hier. Il y avait tellement de monde (il y a quelques minutes) quand je suis arrivé au bistrot pour mon café que j’ai cru que je n’allais pas pouvoir m’asseoir. Ils avaient tous des têtes de fêtards et manifestement il ne devait pas y avoir beaucoup de filles autour d’eux. Ils sont presque tous partis en même temps. Istanbul me plaît de plus en plus.

Hier j’ai oublié de raconter une anecdote de chat. Alors que nous passions devant un bouquiniste, il y avait sur sa devanture quelques disques vinyles d’occasion empilés. Romuald a voulu les regarder et un chat l’en a empêché en poussant sa main et en se couchant sur la pile. C’est mignon mais c’est pas bon pour le commerce.

Après vous avoir écrit et être repassé par l’hôtel, nous sommes partis dans la zone des embarcadères. Il s’y trouve comme son nom l’indique les départs des bateaux touristiques mais aussi des bateaux « bus » qui traversent le Bosphore. Il y a aussi le musée d’art contemporain. Comme on est du matin, on est souvent en avance sur l’ouverture des musées et monuments. Nous avions plus d’une heure à perdre. Perdre du temps en vacance est un loisir. Les quais étaient à quelques mètres et nous avons décidé de les rejoindre. Nous avons marché (la randonnée urbaine est notre dada) pour trouver un passage. Le quartier est soit neuf, soit luxueusement rénové. Il y a des boutiques de grand luxe et des hôtels palaces avec des chauffeurs qui attendent devant leurs Mercedes. Chaque passage vers les quais était militairement gardé. Au loin, il y avait un de ces paquebots géants avec des croisiéristes sur leur balcon. Nous nous sommes dit que les quais étaient réservés aux touristes arrivés par la mer.

Pour nous, faire des détours inutiles est toujours une occasion de mettre en scène Bidule. Nous avons fait demi tour et comme nous étions encore en avance, nous avons profité de la fraîcheur laissé par la pluie pour s’assoir sur un banc plus ou moins sec en attendant l’ouverture du musée.

En fait, pour accéder aux quais et au musée, il fallait passer un contrôle de sécurité.

On se sent bien à Istanbul, comme dans n’importe grande ville on fait attention à son sac mais à aucun moment nous n’avons ressenti un quelconque sentiment de danger. Ce qui me fait le plus peur, c’est la présence policière sur-armée, parfois même avec des véhicules proches de chars d’assaut.

Avec Bidule, les contrôles sont systématiquement des moments d’angoisse. Les Turcs étant sympas et curieux, ça se passe bien. Nous avons passé le portique. Nous ne savions pas encore si nous pourrions rentrer au musée avec notre boulet.

Nouveau contrôle de sécurité. On donne la carte au gardien qui rigole et la tend à sa collègue qui était devant son écran pour regarder à l’intérieur des sacs des gens. On demande si on peut laisser Bidule dans un coin le temps de la visite. Les gardiens font appel à une responsable à qui Romuald explique à quoi sert cet objet. nous avons l’autorisation et nous rentrons. Effectivement, la taille de la consigne permet à notre œuvre de faire sa première entrée dans un musée à l’international. C’est pas encore la gloire mais c’est un premier pas.

L’expo temporaire phare est une installation d’une artiste Japonaise à la mode. En France elle est galerisée chez Templon. C’est de l’art international et financier. C’est pas le pire. On aurait pu tomber sur Koons ou Buren. On s’estime chanceux.

On passe par la terrasse du musée dont on doit l’architecture du bâtiment à Renzo Piano. La vue sur le Bosphore est gâchée par le paquebot mais il nous reste celle vers les mosquées et la tour Galata. Il y a plein de goélands aussi.

L’expo permanente est chouette avec beaucoup d’art vidéo dont certaines très belles pièces. De la peinture et un peu de photographie allant des années cinquante à nos jours forment la collection. Nous ne voyons aucun nom connu mais nous ne regrettons pas la visite.

Enfin, la deuxième expo temporaire est dédiée à un artiste turc décédé il y a quelques années. Nous n’y trouvons rien de palpitant, on fait le tour en débriefant l’expo avec Romu et on redescend au sous-sol pour mettre fin à la première installation de Bidule en Turquie.

Nous traverserons le quartier tout neuf et barricadé où encore se succèdent des hôtels étoilés et des boutiques qui vont avec et tentons de comprendre comment on fait pour trouver un bateau qui nous fera traverser le Bosphore pour rejoindre le continent asiatique. Le niveau d’anglais des turcs et légèrement plus élevé que le mien mais beaucoup plus bas que celui de Romuald. Après avoir questionné des employés dans des baraques destinées aux croisières à touristes dans le détroit, nous trouvons enfin le départ des bateaux-bus. Le type est sympa et nous dit, après avoir passé un appel au talky walky, que la navette arrivait dans une minute. La navette en était une, au sens spatial du terme. Arrivés à quai et arrimés, nous sommes rentrés dans le petit vaisseau en payant pas grand-chose et quelques instants plus tard nous partions en croisière Romuald et moi avec deux marins d’eau salée. La rentabilité du service m’a questionné d’autant que le bateau est reparti dans le sens inverse avec une seule personne.

Il était midi passé et j’avais faim. Manger ici n’est pas un problème. Au contraire, c’est ne pas être tenté continuellement qui en est un. Je n’ai jamais vu un pays où il y a autant de choses à manger partout. Tout est appétissant. Nous avons pris des burgers locaux, je voulais les goûter. Ce sont des sandwiches cuits à la vapeur. C’est mou et tendre, je ne sais pas trop ce qu’il y a dedans mais c’est bon. On a pris une barquette de frites et de l’eau. La veille nous avions flambé un peu sur notre roof top, là nous avons mangé copieusement pour moins de 10 € à deux. Nous sommes partis en balade.

Je me suis vite rendu compte que les Asiatiques ressemblaient beaucoup aux Européens. Ils ont l’air de parler turc et nous n’avons pas vu l’ombre d’un rouleau de printemps.

La pluie du matin était loin, il faisait chaud. Il avait du monde dans les rues commerçantes près du port. Nous n’étions pas les seuls touristes mais l’oppression ressentie la veille avait disparu. Tout en bidulant, nous avons fait des emplettes. J’ai acheté un ensemble en lin pour un mariage surprise dans deux semaines et des épices pour ma sœur.

Problème de riches. Les frais bancaires liés aux paiements par carte ou pour les retraits sont un peu prohibitifs. Nous devons donc retirer des sommes d’argent un peu conséquentes pour ne pas à avoir recommencer l’opération trop souvent. Mais ici, 20 euros se transforment en 1000 livres turques et il n’y a que des coupures de 200LT comme plus gros billets. Le problème c’est qu’avec pas grand chose on surcharge le porte feuille et qu’il est gênant de faire le nabab en public. J’enfile ma fortune en catastrophe et je met tout ça au fond du sac, nous partagerons le butin avec Romuald quand nous serons au calme.

Voyager dans un pays musulman implique que l’offre en boissons alcoolisées est réduite. À Istanbul elle est loin d’être inexistante. Nous voulons prendre une bière et nous cherchons une terrasse. Avec un peu de persévérance on arrive à tout.

Romuald avait vu qu’un grand bazar aux antiquaires se trouvait à une demi-heure de marche. Nous voulions terminer la journée à la plage, sur la mer de Marmara, à cette heure, le soleil était encore au zénith. Nous sommes sortis de ce quartier très vivant pour traverser une zone beaucoup plus résidentielle.

Istanbul nous fait beaucoup penser à Los Angeles. Bien que la masse de personnes qui s’y trouve soit piétonne, toute la place est faite aux voitures. Il n’y a pas de passages piétons et quand ils existent ils sont effacés par le temps. Il y a des trottoirs étroits qui de temps en temps disparaissent et nous obligent à cohabiter avec les véhicules à moteur sur deux ou quatre roues. Les vélos sont inexistants. Passer un carrefour est une aventure pour Indiana Jones (les serpents en moins).

Le marché existe et gigantesque, seulement il n’y a aucun vendeur. C’est le désert. Heureusement que Bidule est là pour nous donner une raison d’être ici.

Nous voulons rejoindre la plage et nous ne nous sentons pas de marcher une heure de plus. On regarde si cousin UBER peut nous aider. La course est à un tarif ridicule mais l’application ne fonctionne pas ici. Un taxi passant par là voit notre désarroi et s’arrête. Nous lui demandons un tarif approximatif pour la course et cela reste très peu cher. Un quart d’heure plus tard, on est à la mer. C’est un quartier huppé. Les plages sont privées. Nous comprenons plus tard qu’elles sont payantes mais publiques. C’est à dire que nous devons acheter une carte à une machine (qui dysfonctionne), que nous devons la charger en argent ensuite pour pouvoir passer les portiques et rejoindre la plage. Cette carte sert aussi pour le métro. Après nous être baignés avec et sans Bidule et avoir flâné à l’ombre du parasol un peu moins de deux heures, nous avons pris le chemin inverse en bus cette fois. Le bus à deux étages était blindé. Rentrer avec Bidule était une prouesse technique.

Le métro est un peu compliqué. On doit sortir et payer à nouveau à chaque changement de ligne. Nous avons dû recharger notre carte plusieurs fois sur le chemin. L’écran propose une version française qui ressemble beaucoup à la version turque.

Une fois à Taksim, sortir du métro était une randonnée souterraine.

Après un apéro au rosé dans un bistrot, nous avons mangé dans une cantine en mode self service. On sait pas trop ce que l’on a commandé mais c’était bon et presque gratuit.

C’était l’heure d’aller au lit.

Aujourd’hui, Bidule reste à l’hôtel. On file à Sainte Sophie.

PJ Blanchon

PJ est également artiste plasticien et travaille avec Romuald sous le nom de Romuald&PJ