Je suis souterrain #1 : Brice et sa Pute

Brice et sa Pute

« La première fois que j’ai bu un verre, je l’ai bu en entier » (1) d’une voix cristalline. La première fois que j’ai vu Brice et sa Pute, je l’ai vu en entier. Au NTH8, Lyon 8e. Duo avec cage, palette, basse, tambourin. Marie Nachury (Nach) chante des textes qui claquent d’intelligence et Pierre Pierre claque sa basse : Le boléro de Ravel est un hymne punk qui monte doucement. Sur le répondeur de Marie Nachury, la voix de Patrick Vitapino, son conseiller financier, lui propose de lui faire « goûter à la douceur de l’argent bien géré, bien placé, bien capitalisé ». Il est doué. Telle est sa quête et son devoir, il est banquier du cœur.

Une autre fois, une scène sur la place de La Croix-Rousse, une cage, une basse, chanteuse en robe blanche à pois noirs, années 40, France de Vichy.

(c) Romain Etienne. Subsistances 2011

La basse: ta tam ta tam ta tam ta tam

Nach : « Suis-je assez pauvre ? »

Devant la scène, une pochtronne anonyme : « Salope »

Nach : « Avez-vous déjà tué quelqu’un ? »

La basse: ta tam ta tam ta tam ta tam

La Pochtronne: « Salope »

Nach : « Si vous deviez tuer quelqu’un, ce serait plutôt… »

La Pochtronne: « Ta gueule »

Nach : « Ai-je assez d’amour pour faire exploser un char ? »

La Pochtronne: « Sale pute »

Ambiance de fête de village, « la folle avec ses sacs pleins d’escargots. Elle fait la manche et des petites statues ».

Plus tard. Un autre soir, il fait froid et noir. Je remonte la rue Bon Pasteur. À hauteur du Bal des fringants, une voix de femme chante juste et haut. C’est Marie. A l’intérieur, moiteur et lumière. Ambiance chaude, paroles sexe et politique, textes poétiques. Et une apparition. Adriana Karembeu : « Adriana Karembeu a plié bagage sur un coup de tête : deux chemisiers, une brosse à dent. Adriana veut s’aérer et vite. Elle ne prévient personne, sort de l’immeuble, prend le métro [direction Croix-Rousse]… elle est libre, elle respire le tunnel qui l’emmène. Adriana a la vie en elle, ça chatouille les sexes de tous. Au milieu de nous c’est ridicule tant de beauté. Les regards sont inévitables. »

Et moi, je suis là, prêt à partir avec Adriana que je n’avais vue qu’à la télé. Et je me demande si elle se demande « Has anybody seen my legs ? » Je n’en sais rien, je suis trop timide, je ne le lui demande pas. La bière me fout la trique

La dernière fois que j’ai vu Brice et sa Pute, c’était au NTH8. Il n’y avait ni cage ni basse. Marie et Pierre avaient laissé la place aux potes, mis la casquette Dur et Doux et le théâtre à l’envers, organisé la soirée. Le label, bordel, le label.

Texte Philippe Liotard / Photo Romain Etienne

  1. : toutes les citations sont de Brice et sa Pute