Ne jamais rêver d’araignées

Le temps s’effondre entre les lèvres étrangères[1]
mes jours s’effondrent en un tube creux
le proche implose contre le présent
comme un mur d’acier
mes yeux sont obscurcis de décombres
un frottis de perspectives
brouille chaque horizon
dans la précision souffle-court du silence
un mot se forme.

La chair renégate une fois déchue
l’air tombe et git sur mon visage
effilé et bleu comme une aiguille
mais la pluie est tombée sur octobre
et la mort étendue       une sentence
à-même mon sang.

Le parfum de ta nuque en août
des bijoux d’or fin en guerre
tout le reste ment
aussi illusoire qu’une ferme
de l’autre côté de la vallée
disparaissant au crépuscule.

Jour trois      Jour quatre      Jour dix
septième étape
une porte voilée vers ma cinquantaine
mon invincible certificat d’émancipation déchiqueté
dans les mâchoires d’un dogue de Cuba
ne jamais rêver d’araignées
et quand ils m’ont arrimée aux tuyaux
une boule de lumière.

[1] Audre Lorde apprend à 44 ans qu’elle est atteinte d’un cancer du sein, qui induit une nécessaire ablation.

[Retrouvez ici toutes nos traductions d’Audre Lorde]

Journal Le Zèbre