Décidément Lyon devient une ville, qui m’excite de plus en plus. Et pourtant nous nous sommes quittés, l’an dernier, sur des faits de société des plus surprenants. Des écoles lyonnaises vides et chauffées, des habitants dont les enfants dorment dans la rue après l’école. Une maire d’arrondissement mise en garde à vue après, apparemment, de fausses allégations de membres de la BAC, puis traitée d’irresponsable par le maire de Lyon, etc. Enfin un imbroglio digne des meilleurs films des Marx Brothers (pour le jeu de mot). Voilà, tout était dit, évidement : Ubu au pays des quenelles…
Mais depuis mi-janvier je fais des rencontres qui m’éclatent les papilles, l’une d’entre-elles, la venue d’une « punk arty« , au Kraspek, ce mercredi, Mary Ocher.
Lunettes décalées, paupières bleues jusqu’aux sourcils, cheveux tantôt teints en blond aux racines noires bien apparentes, tantôt verts, Mary Ocher est marginale dans son look et fière de l’être. Excentrique et militante, elle est une figure du mouvement underground. Multi-activiste, aucun monde ne lui est inconnu, de la musique à la poésie, en passant par la réalisation de films, de documentaires, et de clips vidéo, ou encore de performances artistiques. Radicale et pragmatique, surréaliste plutôt dadaïste, elle nous interpelle ! Et nous ressuscite.
« T’as envie de mourir ?« , demande Ocher pour critiquer la guerre menée par Israël. Marie a refusé le service militaire parce qu’elle considère Israël comme un fauteur de guerre. Les thèmes qui la préoccupent : la guerre, la religion et le féminisme.
Née en Russie, quelques mois avant que l’Union soviétique ait complètement disparu, elle déménage à Tel-Aviv avec sa famille. À vingt-ans elle quitte Israël pour Berlin. Ses raisons, toujours politiques : « pour moi, il n’y avait qu’une seule option, ne pas y rester« , dit-elle, car « je ne soutiens pas le nationalisme israélien« . Elle vit aujourd’hui dans le quartier de Friedrichshain, sans illusion pourtant : « Il est très facile de vivre ici dans une bulle en dehors de la culture dominante, et c’est très intéressant pour moi« .
C’est la passion qui la possède ! Dés 11 ans elle écrit des chansons et les enregistre sur des minicassettes qu’elle transporte en voyage scolaire. « J’ai commencé la guitare et les claviers autour de l’âge de 14 ans. Allant d’audition en audition avec un seul problème, ne pas être en mesure de surmonter un trac épouvantable. Il m’a fallu des années pour me sentir à l’aise sur scène et de leurs dire : j’en ai rien à rien à foutre qu’ils m’aiment ou pas… juste les faire réagir d’une certaine manière« . Son premier prof lui dit : « ton rock, c’est de la merde« . Un déclic, peut être, puis tout s’enchaîne. Elle choisit le folk, parce que musique contestataire, mais un folk plutôt anti-folk, qui grignote à tous les styles et toutes les sonorités.
C’est dans un cabaret qu’elle a rencontré son producteur, Arish Ahmad Khan aka King Khan, auteur du décalquant Bite my tongue, rock & roll gourou canadien et producteur, entre autres, des Black Lips. Il décrit la musique de Mary comme « un mélange de Kate Bush, Kim Fowley et Buffy Sainte-Marie » !
Les chansons de Eden, son deuxième album solo après War Song ,sorti mi-Juin 2013, elle les a enregistré presque à elle seule avec clavier, guitare, synthétiseurs et des instruments à cordes indiens. Identité nationale et religieuse sont les thèmes de ce nouvel album : « Il ne peut y avoir un peuple qui ne soit pas féministe « , dit-elle. « C’est assez simple : Il y a deux sexes, et les membres des deux Geschlecher devraient avoir les mêmes droits. »
Ce qui ne l’empêche pas dans le même temps de créer un nouveau concept art-rock, avec les batteurs virtuoses Abraham Youssef Soto Zamora (Santiago, Chili) et Oliver Rivera-Drew (New York, Etats-Unis), Mary Archer et son Gouvernement.
Piano et Folk Garage en ambiance, Marie Ocher est connue pour son style théâtral, parfois presque sauvage, et toujours cette voix imprévisible. Et quelle voix my dear ! Perçante, mais aussi extravagante que son évolution constante ; un projet d’art en marche. À la question « Qui ou quoi vous inspire pour écrire de la musique ? », elle répond : « Le désespoir, la peur, la solitude, le doute, la colère. Mais aussi l’espoir, le désir, l’excitation, la confiance. Qui ? Un groupe fantastique de personnes, qui se sont tous libérés de leurs chaînes, de l’intolérance et de l’isolement dans un monde de paillettes ».
Visionnaire, irréelle, auto-proclamée, fautrice de troubles… Allez… je vous laisse à vos rêveries petites canailles ! La boucle est bouclée, le collège est toujours chauffé, les pauvres sont toujours dans la rue, on ouvre des centres IVG aux frontières espagnoles et les fachos gambadent dans les rues de Paris aux cris de mort aux…. Je me dirige tranquillement vers le Kraspek, avec mes docs zébrées et coquées, sait-on jamais !
MARY OCHER mercredi 12 février Kraspek Myzik à 20h30. 6€
http://www.maryocher.com/