Les Castagnettes de Carmen # 27
Le Retour d’Ulysse dans sa patrie de Claudio Monteverdi, Festival « Vies et destins » de l’Opéra de Lyon à la Maison de la danse, du 29 mars au 3 avril
Le Retour d’Ulysse dans sa patrie est la troisième œuvre du festival de l’Opéra de Lyon, qui avait cette année pour thème « Vies et destins ». De fait, en matière de vie et de destin extraordinaires, le héros d’Homère se pose effectivement là. L’opéra de Monteverdi met en scène Pénélope cernée par les soupirants et pleurant l’absence de son mari Ulysse qui — mais elle ne le sait pas encore — vient de revenir à Ithaque. Le tout se passe sous l’influence des dieux Minerve, Neptune et Jupiter mais aussi sous le regard de ces entités allégoriques très prisées à la Renaissance que sont la Fragilité humaine, l’Amour, la Fortune et le Temps.
La Maison de la danse constitue un cadre des plus accueillants pour une œuvre de format modeste sur le plan tant de la durée que du nombre de chanteurs et de celui des musiciens. L’absence de toute indication des auteurs pour la représentation d’opéras aussi anciens (il fut créé à Venise en 1640) constitue une aubaine pour les metteurs en scène imaginatifs. C’est une lecture à dominante médicale qu’a en l’occurrence proposée William Kentridge : l’écran de fond de scène présente des animations inspirées de scanners, IRM et autres endoscopies, auxquelles se mêlent dessins ou images vidéos. L’estrade semi-circulaire des musiciens forme quant à elle une sorte d’amphithéâtre pouvant évoquer une salle de dissection au centre de laquelle, au début du premier acte, la Fragilité humaine et ses comparses semblent disserter autour du corps d’Ulysse endormi sur un brancard. Mais c’est le choix de faire figurer les protagonistes par de grandes marionnettes qui paraît le plus original, et le plus délicat pour l’interprétation puisque chanteurs et chanteuses accompagnent leur personnage porté et animé par un ou une marionnettiste de la Handspring Puppet Company. Le procédé ne jugule pas totalement un certain statisme mais il apporte une indéniable plus-value visuelle à la représentation.
Le plaisir des oreilles n’est pas dédaigné pour autant, loin de là. La formation musicale dirigée par Philippe Pierlot est excellente et, parmi les chanteurs, la mezzo-soprano Beth Taylor (La Fortune, Mélantho, Amphinomos) et le baryton-basse Matthew Buswell (le Temps, Neptune, Antinoos) sont particulièrement remarquables.
Carmen S.
© Jean-Pierre Maurin