Trois ans. Trois années que la guerre civile défigure la Syrie et meurtrit les Syriens. 150.000 morts, près de 600.000 blessés, 2 millions et demi de réfugiés. Leur pays est en guerre, et pourtant ils créent. C’est le nom d’une exposition qui vient de démarrer à Paris, à l’institut des cultures d’Islam. Depuis trois ans la Syrie se déchire, mais malgré ce contexte des artistes exilés ou restés au pays n’ont pas lâché leurs armes.
Cent cinquante œuvres sont rassemblées à la Goutte d’Or, jusqu’au 27 juillet. Alors que certains artistes ont dû cesser de créer, d’autres ont accueilli dans leurs œuvres, de façon souvent directe, parfois oblique, la violence qui sévit dans leur pays. Certains encore manifestent leur refus obstiné de voir l’horizon de leur création réduit à la guerre encore, encore et encore. Ces œuvres, nous rappellent à notre devoir de solidarité. « Dans mon pays, il ne reste que la liberté de mourir. Dans mon pays, la vie est secrète et la mort publique », raconte le texte publié en 2012 sur Facebook par le collectif No, formé d’artistes et d’activistes. Ils invitent les visiteurs du monde entier à utiliser leur corps pour former la lettre qui signifie « Non » en arabe.
Et l’art dans tout ça ? Cesser ou continuer. Partir ou rester. S’exposer ou se taire. Comment créer dans la destruction ? Certains vivent en Europe, en Amérique, en Jordanie, à Dubaï. Et puis il y a ceux qui sont restés.
Vivons cachés, vivons créatifs.
Pour les artistes restés en Syrie, l’anonymat s’avère indispensable pour se protéger. Deux collectifs et une entreprise sont présents à l’ICI pour l’exposition. Le collectif No qui diffuse sur Internet des œuvres multimédias inspirées du dessinateur palestinien Naji Al-Ali. Abounaddara , une société de production audiovisuelle basée à Damas, spécialisée dans le documentaire et le cinéma d’urgence. Toutes les semaines, ils produisaient une vidéo mise en ligne le vendredi, jour de prière et de manifestation. Le collectif Masasit Mati qui regroupe dix jeunes artistes et militants syriens installés au Moyen-Orient, certains sont encore en Syrie. Ils ont développé un spectacle de marionnettes brocardant Bachar, Top Goon, la revanche d’un petit dictateur.
Les 16 plasticiens et collectifs invités sont Khaled Takreti, Tammam Azzam, Randah Maddah, Mohamad Omran, Abdul Karim, Majdal Al-Beik, Fadi Yazigi, Amr Fahed, Akram al Halabi, Muzaffar Salman, Waseem Al Marzouki, Yaser Safi, Jaber AlAzmeh, le Collectif No Abounaddara, Masasit Mati et Syrie : l’art en armes.
Cette exposition s’inscrit dans une programmation plus large dédiée à faire entendre la voix des Syriens aujourd’hui élaborée en partenariat avec : Chams Collectif Syrie, Ila Souria, Norias, Souria Houria et SyriArt.
http://www.institut-cultures-islam.org/agenda/ ; http://syria.arte.tv/accueil/fra