« Ce sont ces femmes qui m’ont donné l’envie de me battre, de faire du cinéma, de m’engager socialement et de lutter pour que la Tunisie reste ce pays où les femmes peuvent jouir d’une dignité qui ignore le genre, le sexe et l’appartenance ethnique ou religieuse. » Sonia Chamkhi
Trois ans après la révolution, la Tunisie vient de se doter d’une nouvelle constitution. Mais ce pays reste une société ou de nombreux problèmes persistent. Le chômage, celui des jeunes a explosé ! Les régions qui ont vu naître la révolte populaire sont toujours aussi pauvres et marginalisées. Régulièrement, des villages, des régions se soulèvent. Des affrontements éclatent, dans lesquels des manifestants sont blessés. Un ras le bol du chômage, de la flambée des prix, des conditions de vie, mais pas seulement. Des menaces planent encore sur les acquis de la femme. Les artistes et leurs créations culturelles, les journalistes sont périodiquement la cible d’attaques. Les acteurs de la société civile subissent des intimidations, voire des violences visant à les empêcher de s’exprimer.
Que ce soit dans les rues de la capitale et des grandes villes, ou dans les régions pauvres et délaissées, des cinéastes ont saisi leurs caméras et sont partis à la rencontre de différentes réalités. Leurs œuvres sont des témoignages poignants de cette Tunisie qui aspire à une vie digne et à une liberté trop souvent bafouée.
Cinéma et femmes en Tunisie post-révolutionnaire est le thème d’une soirée de projections qui sera organisée le jeudi 20 février 2014 au cinéma le Comoedia à Lyon par l’association Atelier Cultures 5. À cette occasion, deux documentaires et un court métrage seront programmés suivis de débats avec les réalisateurs.
Le film documentaire « Ennajeh » de Chiraz Bouzidi. Chiraz Bouzidi, réalisatrice qui vit et travaille à Tunis, a été formée dans la radiodiffusion, le cinéma et le théâtre. Elle a réalisé cinq courts métrage. Dans le gouvernorat (mohafazah) de Siliana, se trouve un bourg nommé « Ennajeh », tous près, une décharge municipale, destination quotidienne de plusieurs femmes pour collecter ce qui est recyclable et le vendre. Grâce à leur travail, leurs enfants sont scolarisés et leurs maris ont droit à « leur thé quotidien et à leurs cigarettes » ! Ennajeh suit une mère de famille dans son travail dans un dépôt de déchets où elle ramasse du plastique destiné au recyclage. L’image prend parfois la relève de la parole. Un documentaire fait dans la simplicité, celle du quotidien de cette femme et de sa famille, mais aussi d’un quartier .
« Selma » de Mohamed Ben Attia d’une durée de 13 minutes, ce film, produit en 2013, raconte comment Selma arrive à être maîtresse de son destin. Elle veut en effet reprendre le taxi de son défunt mari et rien ne semble l’arrêter. Elle doit surmonter d’innombrables obstacles d’ordre social et économique. Dans le film, cette détermination est racontée en toute sensibilité, avec peu de dialogues, mais une image forte et sensible. Elle nous décrypte la complicité entre Selma et sa petite fille, à la recherche d’un bonheur simple. Ces deux derniers personnages ont une volonté de vivre qui s ‘oppose à cette culture méditerranéenne de la mort.
« Militantes » de Sonia Chamkhi, produit en 2012 est le portraits de huit femmes têtes de liste. Mais aussi, d’autres femmes qui ont pris part aux travaux préparatoires des premières élections libres de l’histoire de la Tunisie. Dans la Tunisie post révolutionnaire, en pleine transition démocratique, meurtrie par la pauvreté, révoltée par l’injustice, des femmes tunisiennes militantes se portent candidates aux élections de l’Assemblée constituante. Ce documentaire retrace le climat des premières élections libres de l’histoire de la Tunisie et la mobilisation des femmes à travers la campagne de candidates des différents partis en lice.
« La Tunisie nouvelle ne sera ni démocratique, ni moderne, ni progressiste et ne pourra pas incarner un tel modèle pour les autres pays arabes et/ou musulmans, si la femme tunisienne n’est pas considérée comme une citoyenne à part entière. Mais, malgré les acquis de la femme tunisienne, obtenus depuis l’indépendance, le spectre d’un retour en arrière n’est pas dissipé. Donc, ce documentaire se propose d’expliquer déjà pourquoi la femme tunisienne est digne d’être l’égale de l’homme et combien les femmes qui incarnent cette exigence méritent le respect et la reconnaissance « , souligne Sonia Chamkhi ( Sonia Chamkhi, L’Homme du crépuscule, Arabesques. Tunis, 2013 http://moustaches.wordpress.com/. )
CINÉMA ET FEMMES EN TUNISIE POST RÉVOLUTIONNAIRE
Jeudi 20 février à 19h au cinéma Comoedia organisée par l’association Atelier Cultures 5. Un débat sera organisé en présence des réalisatrices de ces trois documentaires