Ultra PandaJe ne te parle pas beaucoup de musique(s) en ce moment. Voire même pas du tout. Ce ne sont pourtant pas les sorties de disques, les annonces de concerts et autres évènements musicaux d’une importance primordiale (ahem) qui ont manqué ces dernières semaines. Mais je n’ai vraiment pas envie de me forcer. Je préfère rester le nez en l’air, en écoutant ces disques qui parfois m’accompagnent depuis des années ou qui, au contraire, viennent tout juste de débouler. Et tout garder pour moi, égoïstement. Même si ce tout là n’est pas grand-chose. Parce qu’à chaque fois que la musique s’arrête et que je redescends sur terre – le moins possible, je l’avoue –, la merde qui nous entoure, nous englue, nous étouffe et dont on nous dit que seule une autre merde, plus propre, plus brillante et plus efficace, pourra nous débarrasser de la première, oui toute cette merde finit par me faire oublier ce dont je voulais te parler au départ.

Mais il y a ce LP vinyle, le premier album d’ULTRA PANDA. Ultra Panda est un trio géographiquement éclaté entre Lyon, Tours et Paris et comprenant dans ses rangs l’ancien chanteur des Bananas At The Audience (trois albums au compteur, si tu ne connais pas encore, dépêche-toi de rattraper ton retard, la vie est courte, finalement). Mais revenons-en à Ultra Panda : Satan, Salsa a officiellement été publié il y a un mois, grâce aux efforts acharnés de quelques labels indépendants/DIY et généreusement optimistes – dont la dream team de Bigoüt records et les inébranlables de Rock’n’roll Masturbation mais aussi Canadian records, Chanmax records et Not A Label. Et, surtout, Satan, Salsa est un disque qui confirme les espoirs naïvement enthousiastes et joyeux que l’on avait placés dans Ultra Panda après la parution en 2011 d’un prometteur mini LP sans titre (et toujours disponible chez feu les Disques du Hangar 221, je dis ça, je dis rien).

Ultra PandaL’émulsion pétaradante et charnellement exotique d’Ultra Panda repose en fait sur quelques ingrédients simples mais significatifs : une rythmique (évidemment) ultra trépidante et souvent en mode sprint final ; des lignes de basse entre funk et punk qui décollent constamment malgré leur côté ostensible (comme il n’y a pas de guitare ici cela fait beaucoup de place à occuper) ; quelques frises de synthétiseur d’un kitschoune à la limite de l’indécence ; et cette voix, reconnaissable entre mille… déjà, à l’époque flamboyante des Bananes, elle était responsable d’une bonne partie d’une sacrée identité musicale et d’un joyeux bordel communicatif. C’est que Julien sait parfaitement en jouer, il est porteur d’un chant – ultra – mélo/emo à rendre barjots de jalousie les glavioteurs ados et tendance punk à roulettes. Parce que lui sait donner de la fibre et du caractère à des mélodies vocales qui accrochent sans recourir à la sportivité ou à la gaudriole.

C’est particulièrement flagrant sur les titres plus lents voire mélodramatiques et que finalement j’ai un peu plus tendance à préférer aux énergétiques bourrinades punk qui parsèment joyeusement tout Satan, Salsa. Enfin, quelques effets bien sentis viennent également trafiquer le chant, ce qui lui donne une certaine étrangeté extra-terrestre. À cela s’ajoutent les sons de synthétiseur débiles dont on a déjà parlés un peu plus haut, la basse elle-même de temps à autre manipulée par des effets tourbillonnants et la batterie radicalement ample, jusqu’à en devenir presque irréelle. Tous ces éléments non conventionnellement rock confèrent un caractère résolument electro aux bouillonnements organiques d’Ultra Panda, entre séduction en mode titre-larmes (le saisissant Boom Boom) et hymnes dancefloor (Satan, Salsa, titre sur lequel un invité vient même rajouter un peu de programmation).

Et outre le fait de ne pas choisir entre être un groupe strictement punk rock emo ou un groupe electro zouk braillard – mais de préférer être les deux à la fois –, le principal point fort d’Ultra Panda reste cette capacité à composer des tubes guillerets mais intransigeants et immédiats : en fait, Satan, Salsa est une longue suite d’irrépressibles shake your booty décomplexés et communicatifs. Chaque composition comporte son lot d’idées brillantes et dont le fourmillement confine à l’indécence pure et simple. Toute cette joie non feinte, toute cette énergie semble-t-il inépuisable, cette corde sensible que l’on devine, presque à la dérobée, mais qui revient constamment, cet entrain qui fait du bien… Cela valait bien la peine de remettre un peu les pieds sur terre pour en parler.

Hazam.