Avez-vous vu ces écritures arabes blanches sur fond noir ? Votre réaction première a étés ; de dire « qu’est-ce que ça dit ? » Dérangeantes, inquiétantes, et même menaçantes, nos esprits étroits reprennent le dessus sur le danger réel qu’elles contiennent. Une certaine paranoïa sociale est bien présente. « Ceux qui ne connaissent pas l’arabe peuvent demander à leurs voisins ce qui est écris. Pourquoi ne pas le faire ? « , affirment les artistes.

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Depuis le 8 mai dernier la BF15 propose une exposition du groupe espagnol Democracia. Après avoir fondé le groupe El Perro, Pablo España et Iván López forment depuis 2006 le groupe Democracia. Sous ce nom, ils revendiquent une approche artistique construite sur l’échange des idées et des pratiques, avec une ligne éthique et social forte. Leurs projets témoignent d’un intérêt pour des scènes de la vie sociale et quotidienne marquées par l’importance croissante de l’image et de la notion de « simulacre », à des niveaux politiques, technologiques et culturels. Ainsi des messages inhabituels, à fort contenu social, ont étés introduit dans l’univers du football à travers la performance filmée des supporters Bordelais, lors d’un match.

Le projet Subtexts consiste en l’insertion de messages et de citations écrites en arabe diffusées dans la communication locale (affiches, panneaux publicitaires, presse, radio et TV) sans traduction dans la langue officielle.
Des caractères arabes qui claquent en blanc sur fond noir, une apparence familière, celle des étendards sombres du jihad supposés similaires à la bannière que le prophète Mohammed brandissait lors de ses conquêtes, la calligraphie basique qui le couronne, « La ilaha illa Allah » (il n’y a de dieu que Dieu). C’est ce même bandeau que portaient sur le front les membres du GIA, Le texte est la « shahada », premier pilier de l’islam et profession de foi des musulmans que le Prophète, en blanc sur fond noir et en noir sur fond blanc. Récupéré par Al-Qaïda en Irak et aujourd’hui par les Salafistes en Tunisie, dressé à la place du drapeau tunisien à l’université de la Manouba en mars 2012, notamment.

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Mais revenons à l’expo, les textes incompréhensibles pour la plupart d’entre nous, sont des slogans issues pour la plupart de la mouvance alternative internationale, Hasta la victoria siempre // La uniformidad es la muerte // All power to the people // La liberté est pour tous ou pour personne // La politique est dans la rue // la diversidad es la vida // Freedom, for what ? // Les idoles n’existent pas…
En introduisant des messages relatifs à des aspirations, sous la forme d’un message que l’on estime à caractère violent et répulsif, Democracia rompt le consensus de l’espace public et de l’univers médiatique. Notre perception des sous textes est faite d’émotions, de sentiments, d’idées ou de conceptions simplistes. Ils réussissent à nous interpeller sur ces messages de haine, et notre rapidité à les absorber, à l’image d’une publicité classique.
L’espace public est présenté de manière habituelle comme un espace homogène où le consensus est présent à travers les types de messages, ceux du pouvoir politique exprimé dans l’institution, ceux de l’économie qui s’exprime à travers le système de publicité. Composé de divers groupes d’intérêt, la citoyenneté elle, est multiple et hétérogène.

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Ivan Lopez raconte, « J’ai vu des gens avec nos chemises en arabe au concert de Khaled à Cartagena, et de nombreux marocains étaient présents, et s’intéressent à eux. Ils ont apprécié le fait d’avoir utilisé leur langue, ils y ont vu une tentative d’approche, comme une reconnaissance. »

« Si nous pensons la ville comme un texte construit avec les messages qui prolifèrent dans l’espace public, les sous-textes seraient les antagonismes existant entre les différentes communautés qui se conforment à une population donnée. Aspirations qui ne viennent jamais à se refléter dans les canaux de communication représentés par les médias.« (Democracia).

Meilleure approche de la confiance mutuelle, que cet extrait du poète Mahmoud Darwish (Palestine) propose dans Il est calme, peut nous aider à vivre en paix : « Il est calme, moi aussi. En sirotant du thé avec du citron, boire un café, c’est la seule chose qui nous distingue »

 

F. Bonnéric

DEMOCRACIA . Il n’y a pas de spectateurs, BF15, Lyon, du 8 mai au 15 juin 2013La BF15 11 quai de la Pêcherie 69001 Lyon http://labf15.org/