Une chronique aléatoire où on vous parle cette semaine du livre de Fabienne Swiatly “Du côté des hommes”, de la Brasserie George, d’une rencontre virtuelle avec Léo Ferré, Édith Piaf, Secos et Gégé, La Gale …

lathenanaDimanche 8 mai, coup de téléphone matinal, je sors des brumes d’une soirée de folie, loin des sentiers lumineux et de la nuit des barbus sonores…

Laurie la sublime, la Fabulous, graphiste et rédactrice, entre autre au Zèbre, m’annonce qu’elle est de passage. Son TGV arrive à 12 heures. On se donne rendez-vous à la brasserie Georges, un lieu mythique, crée par la famille Rinck et vendu par le dernier de la lignée il y a quelques temps à un groupe !

Beaucoup de choses on changé depuis dans les années trente où Édouard Herriot y mobilisait ses troupes dans de vastes banquets républicains où la laïcité était le point de rassemblement. Elle fut  Deutsches Kameradschaftshaus pendant la guerre, mais ne vous trompez pas en regardant le carrelage vous n’y trouverez pas de svastiska ( une des nombreuses fausses rumeur qui hante ce symbole de la lyonnaise touch).
Je me suis installé à la table n°126 celle d’édith piaf, pas trop loin de celle de Léon Blum et Paul Verlaine(128), commandé un Chenas, un des rares beaujolais qui surnage dans la médiocrité du nord lyonnais, quand je vois arriver Laurie. Comme à son habitude, elle attire tous les regards, grand manteau noir relooké par notre ami…. Doc Martin et jupe de cuir rouge à “ras le bonbon*”. Je me met à rapper : « La the nana, c’est dans la voix et dans le geste, la the nana, c’est the nana avec un geste ….. La the nana c’est des baisers et des caresse La the nana , à t’défoncer le tiroir caisse ».

Laurie me tape la bise :

– “Boujou, ma poule, quel accueil manque plus que le beat box…. – Amour et Anarchie, La the nana…  Tu sais que c’est les Rolling Stone qui devaient l’accompagner à la place des Zoo, tu t’imagines? Moi je me suis fadé le dernier de Christophe dans le TGV. Toujours aussi classe, y a plus que les vieux dinosaures qui m’attirent. Hé tu sais, je sors de la gare et je tombe sur Secos votre adjoint à la sécurité, il se la pète grave. Une coupe de champ à la main, il inaugurait des nouveaux chrysanthèmes …… Y manquait plus que votre Gégé, genre Don Vito Corleone, si tu as un problème viens me voir.  Ton quartier, gars, c’est le Bronx Underground, je vais m’en occuper. Il est ouf ou il a Alzheimer ton maire. P’utain c’est de la dynamite De Niro Alan Vega,les Black Panthers, le rap, tout sur les pentes. À la Coop vous allez augmenter votre chiffre d’affaire, t’as pas pensé à faire des Airbnb!

Ouais je crois qu’il a pété un câble, il se  » frêchise  » sans le soleil de la vie,  tu sais la dernière, il vient de ressortir le projet sur l’ancienne école des Beaux-arts, le même qu’il y a 10 ans et qu’aucun promoteur n’avait voulu suivre, à peine relooké, un immeuble pour les vieux bourges (7000 euros le mètre carré). Alors que depuis deux ans, la mairie du premier bosse sur un projet de Coopérative culturelle, un projet créatif comme il pourrait s’en faire à Barcelone ou Berlin… je crois qu’il y a une pétition tu peux la signer ? Je lui sers un verre de Chenas et commande une andouillette Bobosse (aka René Besson) et un tartare, évitant la célèbre choucroute qui selon les rumeurs a perdu beaucoup de panache.

 

Laurie : “J’ai terminé hier au soir le livre “Du côté des hommes” de Fabienne Swiatly que tu m’a envoyé. Pas mal, je comprends pas que la presse n’en parle plus. Maintenant que Virginie est au jury du Goncourt, il pourrait s’intéresser aux auteurs lyonnais. D’ailleurs, tu sais pourquoi elle a accepté ? Je la vois bien entre deux plats et 3 Côte de Nuit parler avec Pivot de la renaissance de l’éléctro punk lyonnais. Elle devrait peut être sortir avec Julien Leppers ! Tu vois je change pas, toujours aussi caustique, en tout cas j’aime bien son disquaire, à Despentes, le redac du Zèbre a fait un bon article sur elle. Tu vois je le lis de temps en temps ton Zèbre !

 

Pendant que le serveur me prépare mon tartare avec un doigté de magicien (encore un des rares privilèges de la Georges),  je déblatère :
porquetevas– Moi, pas de doute, j’ai adoré ce bouquin comme j’adore Fabienne. Mais là en plus, je trouve qu’elle a fait un grand pas.
J’aime cette brièveté, ces pulsions qui surgissent au moments où on ne les attend pas, l’humour extraordinaire: “Ne t’inquiète pas, moi aussi je préfère sucer une jeune queue plutôt qu’une vieille”. Comment une femme rencontre l’autre, l’inconnu, l’insaisissable, le dangereux, celui que trop souvent l’on craint. La séduction, les regards les ambiances sonores nous entraînent vers des rendez-vous que l’on aimerait bien souvent vivre. Parfois des moments durs qui transpercent la carapace de l’auteur. Le frère, le père, l’homme… Nous ne sommes pas seulement des gros nounours! La vie sent la glaise qui vous embourbe, la fumée des usines qui crachent la mort. On peut poser son livre près de son verre de bière, rallumer une clope, prendre le temps. Le temps de s’imprégner de cette noirceur ou de ce bonheur, car les deux ne sont pas disjoints, c’est la vie avec un moment plus haut que tout: Vivre…

Tout n’est peut être pas dit, si l’ensemble parait réel, Fabienne nous laisse seuls. Elle nous emporte vers d’autres mondes, bien souvent le nôtre, fait de nos malheurs, de nos non-dits, de nos petites saloperies. Car tout est là, l’effraction, le vice, l’abject, le drame, le plaisir, la rencontre impossible, la beauté toute simple d’un regard, d’une poignée de main. Au lecteur d’inventer et de poursuivre l’histoire, de toute façon cette histoire ne sera jamais finie.

 

Laurie: – “Trop top mon canard ! Manque de liens mais c’est bon.  Tu sais ce que j’ai eu envie de faire en lisant ce bouquin, hier, vers deux heure du mat. Reprendre ma vieille platine celle que l’on utilisait il y a 30 ans dans les studios K’net, la radio libre qui moussait. scratchant  les morceaux que j’aimais ou ceux que le texte m’avait suggéré, en fait, une sorte de jukebox. La nuit blanche commençait, j’étais sûre du mal de tête, mais tant pis, écoute
Elle me tend son casque.

C’est à « Porque te vas« , que je décroche. « Porque te vas/ Porque te vas/ Porque te vaaaaaaaas » . juillet 1976, cette bluette occupe la tête des hit-parades en France. Trois mois auparavant, à Cannes, le jury du Festival décernait son prix spécial à un habitué de la quinzaine, le réalisateur espagnol Carlos Saura, pour Cria Cuervos. Dans le même temps, le 24 juillet, évacuation de la région de Seveso, en Italie, polluée par un nuage de dioxine, le 28 juillet : Christian Ranucci, 22 ans, est guillotiné à la prison des Baumettes de Marseille.

Les immenses glaces miroir semblent me parler, ce n’est pas le son de l’orgue de Barbarie, mais une voix qui me murmure: « Je vais te parler du secret de l’omelette norvégienne. Tu mets un fond de boudoir arrosé avec un sirop de Grand Marnier, tu le recouvre d’une couche de glace, tu enrobe l’ensemble de blanc en neige et tu passes 5mn au four chaud. Final tu flambes de nouveau au Grand Marnier. »

gale1

Laurie: Oh tu t’endors?  Parle moi un peu de La Gale j’ai bien envie de rester pour aller l’écouter au festival d’ Avatarium, Une petite nana bien vénère et toute tatouée avec des instrus qui tapent et des textes qui tuent non!

Abstract, Trip-Hop, Blues ou Punk, finalement plutôt éloigné de l’aspect Electro / Hip-Hop du premier album nous disent certains. D’ après moi elle écoute aussi bien Filastine  que d’autres. Moi ce qui me fait kiffer c’est ses textes et sa rage, et sur scène elle envoie pas mal.  Au musée de la mine cela promet… Je me demande, si je vais pas faire une visite, le rdv est à 19h30 pour une visite guidée du musée, et après on se tape la Gale,

Laurie: –Cela me dit bien, surtout la fin, et faut qu’on amène des bouchons Avataria lance une collecte de bouchons de liège pour un projet d’éco-construction de Catamaran…

Plus le temps de parler, nous sortons et respirons l’air magnifié par Louis Pradel évangélisé par Michel Noir, sacralisé par Raymond Barre, sanctifié par Gérard Collomb. Juste le temps de fumer une Craven A : vivement jeudi  ?

Franck Bonnéric

 

 

 

notes
* “Du côté des hommes” de Fabienne Swiatly Éditeur : La Fosse aux ours

 

* La Gale au festival Avatarium samedi A partir de 20h /  Salem City Rockers so dernier est disponible en digital sur vitesserecords.com et physiquement (en cd et vinyl) chez votre disquaire adoré.
La 17e édition du festival Avatarium se tiendra à Saint-Étienne 19 et 21 mai 2016, et principalement au Musée de la Mine. Au programme comme chaque année : concerts, performances, expositions, ateliers et conférences ; mais surtout une autre façon de faire. De l’art du contre-pied en mode hors-pistes. Investir symboliquement le Musée de la Mine n’a bien évidemment rien d’anodin. Les Avatariens s’y emploient depuis quelques années en tissant délibérément des liens entre le passé et le présent, entre les luttes ouvrières de jadis et les alternatives libertaires d’aujourd’hui, pour édifier un festival Autrement.

*Brasserie Georges l’histoire qui hante les lieux ! Édouard Herriot, fidèle client, en déjeunant avec Léon Blum, aurait déclaré : “Ici, c’est un resto populaire et c’est une cuisine bourgeoise. Voilà ce que devrait être le socialisme”. En savoir plus sur www.lebonbon.fr . En avril 2000, elle recevait ainsi 700 convives pour le lancement de la campagne municipale de Charles Millon, qui a noté sur le livre d’or: «On a gagné la Georges, on gagnera Lyon.» Onze mois plus tard, entre les deux tours, le PS réunissait à son tour 700 militants, pour un grand «banquet républicain». La soirée avait été arrosée, et quelques-uns des candidats étaient repartis le regard très vitreux. «Quand j’ai vu l’ambiance, se souvient le patron, j’ai dit « cette fois, c’est fini, ils ont gagné ».» Quelques jours plus tard, Gérard Collomb conduisait sa famille chez Bocuse, pour fêter sa victoire.   www.liberation.fr/gueules-de-lyon