pervers-truands 1Il parait, en ces temps de réactivité numérique extrême, d’über-communication et d’ubiquité dans l’univers, que les avis les plus courts sont les meilleurs parce qu’ils ont plus de chance de marquer les esprits de tous les gens pressés et en phase avec la modernité : quelques poignées de secondes seulement suffisent pour se faire un avis dont on devra finalement se contenter – il deviendra ainsi définitif mais comme il repose sur pas grand-chose de concret on l’aura oublié dès le lendemain.
Et il est vrai que l’internaute moyen passe rarement plus d’une minute et demie à lire une seule et unique page web. C’est même pour cette raison qu’au Zèbre comme ailleurs il y a des phrases en caractères gras, genre tu n’es pas obligé de tout te taper camarade, on te mâche le travail autant que possible et maintenant tu peux aller lire ailleurs si j’y suis. Mais non ! Reste là : pour l’occasion je vais faire court et je vais même rajouter un maximum de gras voire je vais crier encore plus fort que d’habitude : CE PREMIER ALBUM DE PERVERS ET TRUANDS EST UNE SACRÉE BONNE GROSSE TORGNOLE DANS LA GUEULE.

Voilà. En affirmant une telle chose je froisse sûrement la modestie de ces quatre garçons originaires de Saint Etienne parce que sur l’insert à l’intérieur de leur disque ils ont fait imprimer cette phrase que je trouve toujours magnifique voire magique – j’écris « toujours » parce que ce n’est pas le premier ni le dernier groupe à le faire, ce qui n’enlève rien à vérité de la démarche et comme en plus je suis définitivement du genre à penser que les derniers seront les derniers (sic) et que c’est très bien comme ça…

pervers-truands 2Donc, je reprends : le groupe a fait imprimer cette phrase magnifique et magique : « Pervers & Truands sont des gens ordinaires ». Suivent les prénoms de chacun ainsi que les instruments dont ils jouent (voix écorchée, guitare granuleuse qui suinte, basse au front et batterie en bataille). « Ordinaires », oui… je t’accorde que l’humilité et la simplicité de ton ça ne fait pas très 2014 ni hyper-nombrilisme en smartphone mais par contre ce genre de franchise vivifiante s’accorde parfaitement avec la rudesse de la musique de Pervers & Truands – parce que moi, derrière une telle phrase, je vois très bien apparaitre un gros FUCK OFF ! en filigranes.

Je concède cependant que lorsque j’ai vu le groupe en concert le jeudi 29 mai dernier dans la cave du Trokson à Lyon, j’aurais bien aimé un peu plus de folie, non pas de la part du groupe mais de celle d’un public lyonnais fidèle à sa réputation de congélateur attentiste mais ce n’était pas bien grave non plus : j’avais devant moi quatre types jouant du punk lourd et poisseux, gras et suintant, crasseux et vicieux, magnétique et désaxé.
Ainsi l’ombre tutélaire des légendaires Flipper de San Francisco n’est jamais très loin lorsqu’on écoute la musique de Pervers & Truands ; une référence qui (une nouvelle fois) est assez peu en adéquation avec le troisième et dernier millénaire de la civilisation occidentale telle que nous la connaissons mais qui colle parfaitement avec ce sentiment d’urgence que j’ai ressenti ce soir là – urgence dans le sens de jusqu’au-boutisme, je ne parle toujours pas de ce truc lié à l’hystérie contemporaine. Cet album, je te le propulse donc carrément aux premières places de mon top personnel du moment en matière de musiques sales et grimaçantes.

Ce vinyle est le premier véritable album de Pervers & Truands, après trois démos publiées sous la forme de CDr. Outre le fait que ce disque est affublé d’une pochette (sérigraphiée dans les locaux d’Ursa Minor à Sainté) au symbolisme quelque peu obscur, voilà une coproduction totalement fauchée entre les labels Boom Boom Rekordz , Et Mon Cul C’est Du Tofu ? – je te conseille plus que vivement de t’abonner à la newsletter de Pascal –, Los Discos De La Bestia et Lustucrust . Et, comme si ce n’était pas assez passéiste en 2014 de publier un disque en vinyle et de le vendre à un prix (aux alentours de 8 €uros) conforme à une réalité économique équitable, c’est-à-dire en adéquation avec ce que sa fabrication a réellement couté, Et Mon Cul C’est Du Tofu ? propose comme à son habitude l’intégralité de cet enregistrement en téléchargement légalement gratuit, ça se passe par ici maintenant vous pouvez tous éteindre vos iPAID.

Hazam.