Notre Smartphone en poche nous sommes partis dans un quartier que l’on annonce dans certains couloirs du « Lyon off » comme sinistré. N’ayez pas peur, la machine à touristes et les pavés qui vous retournent le dos existent toujours à St Paul, St Jean et St Georges. Le nouveau mal de ce quartier : l’identitaire ! Était-il discret ou endormi ?
Nous avions rendez vous avec Bruno Guichard et l’équipe de la Maison des Passages pour faire le point sur les incidents de la semaine dernière et surtout pour parler de l’activité future de la Maison des Passages.

maison-des-passages 1FB : Pourrais-tu nous parler de la programmation du premier trimestre à la Maison des Passages ?

Le grand moment, c’est le festival Itinérances Tsiganes. La volonté du festival est de montrer la culture des gens du voyage, des tsiganes, on connait la musique tsigane mais on connait moins, par exemple Gabi Jiménez*, il a exposé à la biennale d’art contemporain à Venise. À Lyon vous pourrez le retrouver, non pas dans un lieu de « galeriste » classique et habituel mais à la médiathèque du 8ème. Deux autres temps forts sur le festival, l’un à la maison des jeunes de Rillieux avec Ahmed Khalouaz français d’origine algérienne, qui a écrit un très beau livre sur les gitans et qui va participer à des ateliers autour de l’errance et du voyage. Une partie artistique avec Laurence, une metteuse en scène, comédienne, photographe pour une création sur le thème « nous sommes tous des Hommes”. Quels regards portent-ils sur nous et quels regards portent-ils sur eux.
On vit une époque de risque d’enfermement, de repli sur soi, de repli dans des communautés, qu’on soit Rom, gens du voyage ou rien du tout on demeure un Homme aujourd’hui. On a voulu appeler notre festival cette année « Nous sommes tous des Hommes« .

Il y a un temps fort immédiat qui est la semaine prochaine, autour de la semaine pour l’égalité, piloté par le conseil régional. On a mis en avant comme on avait fait l’an dernier, « les femmes étrangères« . Un premier aspect sur les femmes en Tunisie qui ont été à l’origine d’un mouvement révolutionnaire. Une exposition de photos de Claire Malen (autour de la 3e Marche Mondiale des Femmes, mouvement altermondialiste créé en 2000. L’exposition « En Marche ! » a été présentée à la Bibliothèque nationale de Tunis en mars 2013. enmarche2010).
Des rencontres : une femme poétesse et une femme qui vient du sud tunisien, (Zakia Difaoui professeur d’histoire et poétesse, Leila khaldi Labidi femme du bassin minier de Redeyef).

Et puis le mardi 8 octobre, une belle initiative : « la place des femmes de l’Afrique subsaharienne, dans les rapports d’égalité homme/femme« .
Comment les femmes qui ont migré et qui ne sont pas des immigrées, articulent telles ces réflexions ? Cette rencontre est plus intimiste, et fait parti de ce que nous avons mit en chantier à la Maison des Passages.

maison-des-passages 2FB : Comme on l’entend, la Maison des Passages bouillonne d’initiatives : tu nous réponds que le monde bouillonne !
Votre programmation n’est pas sans gêner ! « Particulièrement des jeunes fanatisés au lavage de cerveau médiatique ou militant, et passés à la machine à tambour de la société « (ndrl). Ainsi la semaine dernière, une très belle initiative (tout le monde retiendra de ce soir là, le chant et la voie d’Anna Küpfer, et bien d’autres lectures) a été brièvement interrompue. Peux tu nous en parler ?

Je vais expliquer le cadre dans lequel cette soirée a été organisée. Nous sommes trois partenaires dans cette affaire, La Maison des Passages, la maison des jeunes du Vieux Lyon et une association de Vaulx-en-Velin, l’espace projet inter-associatif. L’idée était de dire « la question fasciste demeure encore aujourd’hui en France, ça fait une quinzaine d’années qu’ils labourent la terre française, ils sont dans une espèce de quête qu’a eut l’extrême droite au début du 20ème siècle et dans les années 20, il y a eu une renaissance de cette pensée là. Elle est forte, même très forte.
Qu’est-ce qu’on pouvait faire sachant que les identitaires lyonnais sont dans le Vieux Lyon et qu’ils essayent de s’emparer de ce territoire. En tant que lieux culturels nous devions donner à entendre les victimes du fascisme, mais aussi lire des textes fascistes, pour que les gens entendent ce qu’ils disent, la poésie étant le meilleur vecteur.

Le thème de la soirée : Des voix célèbres contre le fascisme ordinaire. Trois soirées, une qui a eu lieu chez nous le 27 septembre, une à la maison des jeunes le 30 janvier et une autre à Vaulx-en-Velin début juin. Les deux premières soirées ont été conçues pour des lectures de soirées poétiques, la troisième était un débat. Nous avions demandé à des gens de lire des textes : un magistrat, des avocats, des historiens, une sociologue, ainsi que des personnes de la maison des jeunes du Vieux Lyon.

L’idée était vraiment une histoire de partage, une émotion, une sensibilité… C’était une belle soirée du point de vue du contenu, avec une déception, il y avait peu de monde, une soixantaine de personnes. Nous avions espéré deux fois plus de monde, voir plus. Ça nous interroge …

maison-des-passages 3Puis les identitaires de Lyon sont venus, on les soupçonne bien évidemment (Ils ont été reconnus ). Quand on les a vu arriver on a fermé le local. Pendant 15mn ils ont fait du tapage sur les portes, voulant entrer dans le local. Ils sont venus pour perturber, empêcher la soirée de se dérouler correctement. Donc c’est quand même une bonne chose qu’ils n’aient pas pu rentrer, et qu’on ait pu finir cette soirée. Après nous avons appelé la police, ce qui a permis aux personnes de sortir en sécurité. Je retiens une chose : quand on parle de fascisme ils sortent « du bois » ce qui veut dire que finalement ils sont fascistes etc. …
Ce soir là nous avions lu le texte : « député à Paris, tortionnaire à Alger » qui vient d’être édité en français dans le livre « La Pacification ». Dans ce même livre, ce qui je crois les dérangeait beaucoup, nous avions lu deux témoignages sur la torture exercée à Lyon pendant la guerre d’Algérie, par les policiers lyonnais.

On doit faire 150 levées de rideaux par ans à la maison des passages. Je pense qu’il y en a 100 où s’expriment une haine complète de ce qu’ils sont, et ils ne viennent pas. Le lendemain on a accueilli, des personnes qui font de l’art des rues, du graff, de la danse, du hip- hop. Il y avait plus de 100 personnes !!

Mais il y a une interrogation politique, on a tendance à traiter les identitaires comme on traite les roms ou les réfugiés politiques etc. on a un problème de sécurité avec les roms, avec des albanais et un problème de sécurité avec l’extrême droite. Certains ne traitent pas la question politique mais évacuent sur la préfecture, sur les forces de police. C’est évidement un problème de police, de justice mais également un problème politique.

Comment traiter l’extrême droite aujourd’hui ? Comment l’ensemble des forces politiques traite l’extrême droite sur le vieux Lyon ? Est-ce qu’on en fait uniquement un problème sécuritaire ?
Quand ils organisent des chasses dans les cafés, des chasses contre les militants homosexuels, ou quand ils viennent à la Maison des Passages. Problème sécuritaire ? Ou Problème politique ?

Pierre Maurier

 


*La Maison des Passages a décidé de porter plainte. http://www.maison-des-passages.com/
*L’ensemble des photos font parties d’un tryptique l’apocalypse selon Saint Nicolas de Gabi Jiménez, Œuvre magnifique composée de trois toiles. Histoire de se rappeler l’été 2010 et la chasse aux gitans .. Pour mieux découvrir l’univers de Gabi Jiménez
 » Vous qui voyez des caravanes, des détritus, des délinquants, des nomades, des indigents, des problèmes, des vols en perspective, des gitans, des parasites de la société, des enfants sales, moi j’y vois la vie, la famille, le bonheur, la joie de vivre, la rage d’exister, la force de continuer, le soleil dans les yeux des enfants. »
« Pour qu’on se souvienne de ce que nous avons été, pour qu’on se rappelle que nous étions des hommes, des femmes et des enfants. L’histoire n’existe que si on la raconte, que si on l’écrit, que si on la montre, que si on la perpétue. « 
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