François Hollande, l’homme qui élimine le racisme d’un trait de plume

 

texticule-de-pedro-4 1On l’a un peu oublié depuis mais notre président a annoncé au printemps dernier une de ces initiatives destinées à placer son mandat sous le signe du progressisme : rien moins qu’une réforme constitutionnelle visant à exclure le mot « race » de la loi fondamentale.
Notre constitution proscrit en effet toute discrimination de race, ainsi que de religion ou de croyance. Formuler les choses ainsi, selon la pensée présidentielle, contribue à reconnaître l’existence de races parmi les humains — dans cette optique, il est certes condamnable de s’appuyer sur les différences raciales pour opérer des discriminations, n’empêche qu’elles existent. Or la biologie humaine atteste qu’il n’y a qu’une seule espèce humaine et qu’aucune distinction ne peut être valablement opérée en son sein ; les traits distinctifs (de couleur de peau, de cheveux, de conformation physique, etc.) sont totalement secondaires et n’opposent par exemple aucun obstacle physiologique au métissage. La race humaine étant unique, prétendre y opérer des distinctions devient absurde ; le texte constitutionnel doit donc devenir véritablement antiraciste en faisant désormais silence sur quelque chose, la race, qui n’existe pas.

texticule-de-pedro-4 2C’est grand, c’est beau, c’est généreux
 : jusqu’à présent nous vivions sous l’emprise d’une constitution implicitement raciste alors qu’elle prétendait le contraire. Grâce à François Hollande, nous serons désormais débarrassés de toute mauvaise pensée présupposant que Noirs et Blancs sont foncièrement différents. Aux mauvais esprits qui en douteraient encore, notre président prouve de manière irréfutable qu’il est de gauche.
On peut quand même s’interroger. Le raisonnement présidentiel repose sur l’idée que dès lors que le mot de race aura disparu, le racisme qui lui est attaché disparaîtra avec lui. Il y a ici, me semble-t-il, une confusion tendant à assimiler une réalité et le mot qui sert à la désigner — ici le terme qui pose une différenciation des humains (« race ») et des attitudes discriminatoires qui se manifestent dans la vie de tous les jours (le racisme). Qui croira que, parce que le mot race aura disparu de la Constitution, les agences immobilières et offices HLM accueilleront désormais avec bienveillance les familles issues de l’immigration sub-saharienne ? Que le « je crois que ça va pas être possible » opposé aux jeunes d’apparence maghrébine à l’entrée des boites de nuit va immédiatement cesser ? Que les employeurs accepteront désormais sans difficulté de placer des individus à la peau sombre dans des postes en contact avec le public, rompant ainsi avec des pratiques discriminatoires patronales dont les exercices de testing ont montré le caractère généralisé ?

texticule-de-pedro-4 1Les différences de race n’ont, c’est tout à fait vrai, aucun fondement biologique. Le rappeler et le marquer par des gestes puissants est plus que nécessaire : indispensable dans le contexte actuel de porosité croissante de la cloison entre droite et extrême droite (on remarquera au passage, contre la propension à attribuer un racisme généralisé aux classes populaires, que celui-ci est légitimé d’en haut, d’homme africain pas encore entré dans l’histoire au constat qu’il y a trop de Noirs dans la ville d’Evry en passant par l’omniprésence des « Auvergnats » et les vols de pains au chocolat). Mais il en faudra plus pour éliminer la croyance, énoncée de toute bonne foi et souvent sans intention mauvaise, que des traits physiques observables sont au fondement de qualités distinctes. Qui s’est indigné que les journalistes sportifs portent aux nues le sportif Christophe Lemaître pour « être le premier Blanc à courir le 100 mètres en moins de dix secondes » ? Passée en boucle sur radios et télés, cette assertion repose sur l’idée que la couleur de peau est bien un principe explicatif d’une inégalité de performance. Sans être en elle-même discriminatoire, elle est foncièrement raciste.

Surtout, l’initiative présidentielle manque lamentablement son but du simple fait que la race n’a pas qu’une existence purement biologique : elle est avant tout un fait social, une croyance plus ou moins répandue et plus ou moins haineuse que des différences d’apparence fondent des distinctions (elles-mêmes variables) de qualités, de compétences ou de défaillances. Pour être erronées, ces croyances n’en produisent pas moins des effets parce qu’elles sont au principe de pratiques discriminatoires.

texticule-de-pedro-4 2Et pour finir, une suggestion : étant donné qu’il est désormais acquis que les différences de sexe ne fondent aucune inégalité de qualité ou de compétence, et que les femmes sont à même de réaliser les mêmes tâches que les hommes (c’est ce que défend officiellement, et à juste titre, l’actuelle ministre des Droits des femmes), pourquoi marquer cette différence en souhaitant faire en priorité entrer des femmes au Panthéon ? N’est-ce pas consolider une distinction, cette fois fondée sur le sexe, dont on proclame par ailleurs qu’elle est sans influence déterminante sur les qualités des personnes ? On le voit à cet exemple, pour simplement constater que les femmes sont ultra-minoritaires au Panthéon (comme dans la plupart des lieux de pouvoir), il faut reconnaître qu’une différenciation sociale en regard du sexe existe. Pourquoi s’interdire de le faire (on sait que c’est tout l’enjeu des « statistiques ethniques ») en matière de différence d’apparence ?
Cher président, encore un effort si tu veux être antiraciste…

 

Pedro