Carnet de routes qui ne mènent nulle part

Chroniques d’aventures indélicates sur les routes nord-américaines. Entre le blues du Delta et la baie de Monterrey. Entre la vallée de la Mort et les émeutes de South Central. Entre les plages de Miami et les terrains vagues de Motor City. Entre les lignes. Entre fiction et réalité. Entre hier et aujourd’hui. Entre balade autobiographique et essai option envers du décor.

Un carnet de routes à parution et destination aléatoires.

longhorns-1

8. à l’ouest du Pecos

Deux cent bornes sans le moindre virage assassin que je pilotais machinalement tel un robot dans les couloirs du métro, en fantasmant à l’idée de regagner une chambre climatisée dans un motel oublié en bord de route. Avec un peu d’imagination, il y aurait même un conifère géant sur le parking pour faire de l’ombre à la bagnole. Et à ma tête brûlée. Éventuellement un puceau psychopathe au comptoir, qui aurait facétieusement empaillé sa mère-grand ; je ne serais pas regardant. Mais non rien. Même pas le mirage de. Seulement quelques cactus épars distillant sur le sol en mode clair-obscur, des silhouettes immédiatement provocatrices. Et mes yeux pour pleurer, face à cet horizon officiellement aveuglant du désert texan dans toute sa splendeur. Un néant intégralement orangé combinant pour le plaisir, reptiles écrasés, ossements divers et variés, hululements occultes et pierres qui roulent. À perte de vue et de montagnes pelées. Avec mézigue perdu au milieu de. Les mains désespérément moites mais agrippées au volant et l’œil chien battu me dévisageant dans le rétroviseur. I’m a loser Baby so why don’t you kill me ?! Accessoirement dessine-moi un platane. Narquois comme il se doit, mais droit dans ses bottes. L’arbre de la dernière chance, pour faire la nique à cette insoutenable routine à la saveur calcinée. Faute de quoi je te le promets, je m’en vais dézinguer tout ce qui bouge à grands coups de pare-chocs. Foncer dans le tas. No red light no speed limit ! Fuir ce ramassis de vide géolocalisé. Enrayer la surchauffe, de l’homme et de la machine. Un fluide brûlant certes un brin allégorique, mais altérant désormais ma vision avec ou sans perles de sueur acide. Et générant jusqu’à la moelle épinière des envies méchamment destructrices. Foncer. Droit devant sans se retourner. Vitesse et précipitation. Seul face à soi-même. Foncer. Et puis… Rétrospectivement, je me dis que je devrais sûrement bénir ce panneau STOP sorti de nulle part, qui m’avait alors arraché à mes rêveries option fuite en avant. En supposant qu’en terme de divagation interne, je m’apprêtais calamiteusement – mais sûrement – à rejoindre ce monde perdu si cher aux Désaxés. Sans même soupçonner que ce n’était qu’un début. Que le désert était loin d’avoir dit son dernier mot. Quant à mon flegmatique copilote, il siestait recroquevillé à l’arrière de la Oldsmobile comme si de rien n’était. L’infâme salopard ! Totalement insensible à mon triste sort. Et à la vrille d’un esprit en cavale. État second aidant, je projetais de me connecter à lui en interférant directement dans ses songes. Notamment pour lui demander de m’ouvrir une bière fraîche. Ou de visualiser un putain d’oasis sur la cartographie de ce no man’s land. Sauf qu’il ronronnait de plaisir et qu’il valait mieux économiser notre salive, même en plein cauchemar, pour ne pas avoir à s’évaporer sur le champ. J’avais cependant comme une irrésistible envie de me faire plaindre. D’échanger quelques banalités, ne serait-ce que pour me cramponner à un ersatz de réalité. Et voilà que je maudissais ce serpent espiègle délogé d’un imaginaire biblique, qui me faisait ostensiblement de l’œil en direct de la sortie de route. Je n’avais pourtant consommé aucune drogue. Seulement de la poudre aux yeux. Mais plutôt que de continuer à me lamenter sur ma supposée infortune, j’ai fini par me raccrocher aux frontières du réel et à mon kit de survie qui tenait en deux éléments : des lunettes de soleil et une cassette pour l’autoradio.

Hit the road Jack and don’t cha come back.

Yes sir, I will.

Never come back.

cactus doigt

J’avais évidemment pris soin d’enregistrer moult compilations avant de squeezer l’océan et d’attaquer la traversée du continent. Mais surtout avant d’aller me frotter aux racines du mal qui me sustentaient corps et âme : la musique noire américaine. Originellement accouchée dans la douleur, afin de témoigner d’une tragédie en direct des champs de coton. Continuellement réinventée depuis par des artistes hors catégories, adeptes du seul et véritable melting-pot à la hauteur des espérances : l’Amérique Sonique. Des femmes et des hommes qui ne connurent pas forcément la gloire de leur vivant. « Assignés à résidence » qu’ils étaient, à mi-chemin entre le rythme dans la peau et la prédisposition pour la course à pied (…) Et on ne remerciera jamais assez Jesse Owens. La musique noire américaine, tel un cri qui vient de l’intérieur, pour reformuler à l’arrivée une soif convulsive de changer la donne. De rendre la monnaie de la pièce. De se rêver en Black Panther prête à tout foutre en l’air. Le temps d’une chanson exhalant le Soul Power. Une musique qui imbibe et restitue ainsi toute l’histoire des luttes émancipatrices. Et des désillusions qui vont avec, tout au long du vingtième siècle. Entre utopie non-violente et matraquage institutionnalisé. Entre le rire à pleines dents et l’éclair qui tombe sur le pinacle de la Maison Blanche. L’histoire d’une Rage Noire. Généralement ignorée ou simplement feutrée par les médias du monde entier. Du blues des profondeurs sudistes au rap des ghettos urbains, du jazz des clubs prohibés à la soul des usines abandonnées, du rock’n’roll des faces blanchies à la disco des nuits de défonce, du funk des extra-terrestres à la techno du marasme des Subprimes. Et du mirage de l’égalité des droits. Un immense pot-pourri qui s’est inlassablement entrelacé, samplé et régénéré au fil du temps. Afin que des petits blancs dans notre genre, puissent aller jubiler en bourlinguant sur les routes avec une bande-son digne de ce nom. Ingrédient incontournable d’un voyage réussi, à la fois dans l’espace et dans le temps. Pour marquer le coup, je ferais bien une petite pause là au beau milieu de foutu désert ; et uniquement pour saluer comme il se doit Robert Johnson, Charlie Parker, Nina Simone et Chuck D. Pour dire simplement merci à John Coltrane et à Curtis Mayfield. À James Brown, Gil Scott Heron et à Tina Turner. Merci également à Ian MacKaye, Jello Biafra et aux Beastie Boys qui ne sont pas blacks mais qui mériteraient de l’être. Merci enfin à Prince, Screamin’ Jay Hawkins et aux Bad Brains, et salut à tous les autres. Avec mention spéciale pour tonton George Clinton. Le fantasque Docteur Funkenstein qui avait réussi au tournant des années ‘70, à satelliser musicalement toute la communauté afro-américaine dans l’espace. Et je me souviens précisément de ses premiers mots lorsqu’il était arrivé sur la scène du Montreux Jazz Festival : « We gonna funk you all nite long ! » Tout un programme que l’assistance avait idéalement pris au mot jusqu’aux premières lueurs du jour. Mais sous amphétamines, c’est beaucoup plus facile. Amen.

The revolution will not be televised, will not be televised,
The revolution will be no re-run brothers ;
The revolution will be live.

J’avais ainsi pris soin d’enregistrer moult compilations, pour nourrir fiévreusement notre voyage en notes bleutées et trépidations incontrôlées. Et ce d’autant que l’habitacle d’une voiture lancée à l’aveuglette sur les routes américaines, est assurément l’un des meilleurs endroits au monde pour tomber les watts et les chemises. Mais aussi tout bonnement parce que la musique est le compagnon de toutes les escapades. Le voyant allumé de nos tranches de vies. Le thermomètre de nos envies. You’re sexy Motherfucker ! Le témoin privilégié de notre histoire. Pour ne pas dire son moteur. Notamment lorsque nos recueils soniques s’emboîtent parfaitement avec les moments de notre existence ; qu’ils aient des airs de farandole ou bien de marches funèbres. Il y a d’abord la compilation de l’éveil des sens à l’adolescence, avec des titres dérobés à la sauvette via le poste radio des parents. Puis celle des tout premiers vinyles achetés religieusement chez un disquaire au coin de la rue. Bien sûr celle de la première bagnole et bientôt celle du premier road trip. Advienne ensuite la compilation des grands idéaux et puis celle pour aller au boulot. Celle des fiestas jusqu’au bout de la nuit et celle des lendemains qui déchantent la tête dans le sac. Celle d’un amour impossible et celle de votre mariage avec les éléments. Celle pour ma fille et celles pour tous les rades que je fréquente assidûment. Évidement celles de tous nos carnets de routes et celle de l’oisiveté dans un jardin public. La compilation pour déplacer des montagnes et celle de l’insoutenable légèreté de l’être. Pendant que j’y suis, pourquoi pas la compile de son propre suicide ou de son enterrement ? J’avoue que l’idée de me foutre en l’air ne m’a jamais vraiment traversé l’esprit, mais en l’espèce, je verrais bien un assortiment de quelques tubes de Joy Division, Jacques Brel et Hüsker Dü, et puis tout l’album Pornography des Cure. Je vais encore radoter mais… Je sais quoi qu’il en soit pertinemment que la musique est la maîtresse idéale pour m’accompagner jusqu’au bout du chemin. Non pas que je voudrais théoriser la chose, mais j’avoue que ce « concept de compilation ultime » censée résumer une destinée, me caresse lascivement dans le sens du poil. Le mix suprême qui carillonne la fin de partie. Le fameux tilt avant le game over. C’est quasiment jouissif de penser à cette playlist définitive, dévolue à la personne qui ira éparpiller mes cendres dans la mer Égée. Jouissif certes, mais surtout extrêmement égoïste. Alors autant éviter de spéculer à l’avenir, quant à la recette sonore idéale pour rejoindre le territoire des ombres. La boucler. Embrayer. Regarder au loin. Laisser la radio prendre le relais. Et parasiter subtilement la balade linéaire d’un cow-boy solitaire.

Texas me not

Je ne captais pas complètement ce qu’il baragouinait, si ce n’est que ses lamentations évoquaient à peu près tout sauf une partie de plaisir. Un feu de camp dérisoire sous une pleine lune vorace, pas franchement annonciatrice des jours heureux. Quelques lampistes abrutis par les vapeurs d’alcool, rivalisant en vannes ne faisant rire qu’eux-mêmes. De la bouffe non identifiée et franchement dégueulasse. À faire obligatoirement passer avec du tord-boyaux bas de gamme. Un vieux banjo désaccordé mais c’est un pléonasme. Et le froid qui lui prenait aux tripes. Afin qu’il enregistre si nécessaire, que la nuit aurait le dernier mot. Sale temps pour les chanteurs amers. Et pour leurs auditeurs simultanément perplexes, pour ne pas dire végétatifs, à l’intérieur de la Oldsmobile. Le voyant allumé virait maintenant au rouge écarlate. Voilà qu’il nous fallait urgemment dénicher quelques envolées lyriques réconfortantes, pour nous aider à franchir le cap de ce magnifique et néanmoins démesuré désert de Chihuahua.

Une pampa ultra ridée et hallucinogène, qui s’étend des deux cotés de la frontière, séparant illusoirement Texas et Mexico. Une région généralement propice à la méditation schizophrène et à la langue pendante. Une terre impitoyablement cramée où l’on ne devrait pas tarder à croiser le « petit scarabée » de la série télévisée Kung Fu. Qui pourrait éventuellement nous briefer quant à savoir comment appréhender ces voyages qui forment la jeunesse. Et puis les rites initiatiques pour enfin parvenir à l’age de raison. Tel scarabée, je rêve de m’emparer de cette pierre qui disparaît de la main du maître. La pierre qui roule inexorablement. Celle que l’on imagine pouvoir facilement attraper comme le pompon à la vogue. Mais qui reste toujours hors de portée. Là est sûrement la limite à la compréhension de ce vaste monde. Et à celle d’une métaphore hasardeuse. Tel scarabée, me voici donc condamné à la traversée du désert, pour espérer un jour prochain me saisir de la pierre. Dépasser mes propres limites. Savoir regarder de façon distanciée. Figer l’imperceptible. Et voilà que le vide devient saturé. Orange version sanguine. Le désert un puissant révélateur. Qui parfois réveille quelques cicatrices enfouies dans la chair intérieure. Je suis désormais seul dans les rétroviseurs. C’est ainsi que l’on frappe à ma porte. Uppercut et souvenirs. Courant d’air intérieur et tension extra lucide. Les morts ne nous laissent jamais tranquilles. L’endroit idéal pour passer de l’autre coté du miroir. Envie subite de se rouler en boule sur un carrelage glacé. Froid comme une lame. Déchirement quasi viscéral. Inclinaison à ramper sans savoir où aller. Le brun est manifestement ténébreux cet automne. Se relever. Et dévaler les pentes de ce versant escarpé ordinairement inaccessible. C’est la folie ? Courir vite et plus vite encore. Hallucinogène vous dis-je. Mais tout doux bijou. Ça va bien se passer. On finit toujours par rebondir. Par traverser son petit désert à soi. Chancelant mais irradiant. En commençant par s’affranchir du retour. Et du delirium qui nous habite inconsciemment. Mais qui refait surface au hasard des virages de l’existence. Qu’à cela ne tienne. Je suis né pour avancer. Je t’aime Chihuahua Pearl quand bien même tu m’ensorcelles. Texas me not. Rejet et attirance. Toujours la même rengaine. Avec un goût prononcé pour la « Philosophie » « Borderline ». Deux mots aujourd’hui cimentés, et pourtant annonciateurs d’une antinomie criante. Qu’importe. À trop vouloir analyser une situation, on se perd autant dans les méandres de l’intellect que de la géographie. Mieux vaut laisser parler l’instinct, entre survie et contemplation. Je n’ai plus rien à raconter. Rien d’autre qu’une impression. L’impression d’un désert. L’impression d’un carnet de routes. L’impression d’être là. Et voilà que j’ai tenté d’écraser un serpent. Puis cherché vainement de l’ombre auprès de ce cactus enguirlandé de fleurs roses magnétiques. Plus tard essayé de dormir emmitouflé dans ma couverture indienne. Alors que le souffle du vent semblait s’amuser toute la nuit durant, à mimer la complainte de coyotes esseulés. Loin de mes proches et loin de mes repères, loin de la civilisation et du confort moderne. Paumé quelque part dans l’immensité du Big Bend National Park. Heureux malgré tout. Et vivant ! Bientôt serait venu le temps de lever le camp. D’enfouir ses mains dans la terre rouge. Tremper la tête dans une citerne d’eau contaminée. Et de tailler la route. Droit devant. Foncer sans se retourner.

 

(Complètement) À l’ouest

Une fois n’est pas coutume, Kanardo avait prit le volant et bien évidemment en maugréant. Ronchonner était un peu comme une seconde nature chez lui, et ça me faisait marrer intérieurement, de le voir jouer parfaitement son rôle d’ours mal léché originaire du massif Massif Central. Mais pour l’instant, il somnolait peperroni (1) le pied coincé sur l’accélérateur pendant que j’épluchais les cartes routières et touristiques. Un de mes passe-temps favori depuis la prise de Constantinople. Je crois ainsi avoir passé une bonne partie de ma vie à scruter des cartes en tous genres. Cartes des villes ou des états, des mers ou des toundras, des quartiers, des bleds, des mégalopoles, de la bataille de Pittsburgh jusqu’à la retraite de Russie. De Montréal jusqu’à Valparaiso. En passant par Prague, Casablanca ou Osaka. Des cartes à l’endroit comme à l’envers. Le dessous des cartes aussi. Oui j’adore vraiment ça éplucher les cartes. Et c’est sûrement mon seul trésor de guerre : des cartes d’un peu partout dans le monde, que je punaise ici ou là. Peut-être pour avoir l’impression une fois de retour à la case départ, d’être encore en promenade. À chercher mon chemin dans les faubourgs d’Athènes ou de Varsovie. Sauf qu’en l’occurrence, j’avais beau détailler les environs : pas l’ombre d’un Snake Plissken pour dépareiller à l’horizon. Texas morne plaine. La plus vaste du pays mais certainement pas la plus peuplée. Avec seulement quelques tatous (armadillos) pour égayer un peu nos yeux. C’était sans compter sur le mirage de Fort Stockton ! Une ville à moitié fantôme perdue au milieu de rien, avec rétroaction du rien sur la mentalité du cru. Un patelin rachitique trois cent miles à l’ouest d’Austin, qui s’enorgueillissait d’abriter le plus grand Roadrunner au monde ! Et à en à en juger par la statue trônant à l’entrée du bordel, on pouvait facilement en conclure que les locaux vouaient carrément un culte déraisonnable (américain ?) à ladite bestiole. Et au légendaire dessin animé. Ça tombait bien parce que nous aussi. Un stick de marie-jeanne plus tard, arrime la tète dans les nuages et puis ça repart. À bloc. Comme dans un cartoon. À ricaner grossièrement en visualisant les déboires de ce maudit coyote, définitivement incapable de capturer Bip Bip ! Oui, je vous cause de Bip Bip ! L’oiseau le plus rapide de la planète. Avec de longues pattes surplombées par une face d’abruti.  Bip Bip ! Pleinement solidaire de coyote, j’ai juste envie de dire : ferme-là ! Bip Bip ! Well… On a fait le plein de vivres et de tord-boyaux, et on s’est barré précipitamment, loin de ces givrés adorateurs des roadrunners, qui, à l’instar de bon nombre de leurs compatriotes retirés dans la plaine, vivent comme dans un western. Ou un dessin animé. On s’est barré fissa en direction du nord et ne serait-ce parce que la prochaine étape sentait bon – question de point de vue – non pas ce putain de sable chaud, mais le mythe absolu.

Passer à l’ouest du Pecos ! En franchissant la rivière éponyme. Et même deux siècles après la « conquête de l’ouest », cette traversée demeure éminemment chargée de symbolique. Mais que pensiez-vous trouver de l’autre coté ? La réponse de l’imaginaire populaire renvoie à une contrée sans foi ni loi. Là où la justice expéditive est rendue par le bienveillant juge Roy Bean. Là où les Comanches pourraient rapidement en vouloir à votre scalp si jamais vous pénétrez leur mesa verde. Là où des vendeurs ambulants espèrent vous fourguer leur breuvage de feu. Et là où John Wayne se prend encore pour l’homme le plus classe du monde. Bienvenue chez les dingues.

Nous voilà donc désormais complètement à l’ouest. Un moment à marquer d’un caillou blanc sur le calendrier de la vie. Ivres comme les alizés. Ahuris à s’en lécher les babines. Livrés à nous-mêmes en territoires hostiles. Prêts pour le saut à l’élastique vers l’inconnu. Avec la Oldsmobile faisant office de Fort Alamo. Voilà pour la version ingénue du décorum. Et puis il y a la version disons plus réaliste… Aujourd’hui avec la ville de El Paso en ligne de mire. Ou plutôt « Hell Paso » comme la baptisent ses autochtones. Une cité non balnéaire, où d’emblée la tension sera plus que palpable. Mais que dire de sa voisine mexicaine Ciudad Juarez, seulement séparée par le Rio Grande et par des kilomètres de barrières métalliques, le plus souvent électrifiées. On voulait tutoyer l’envers du décor et on allait être servis.

à suivre…

Laurent Zine

(1) « peinard » en sicilien (traduction fantasmée et sans vergogne)

 

Carnet de routes qui ne mènent nulle part # 7